Le site Renault Somaca de Casablanca débute la production de la Logan 2 alors que l’usine géante de Tanger affiche un retard de quelques mois sur son calendrier d’extension. Le point sur les projets industriels du constructeur au Maroc.
En route pour un nouveau véhicule ! L'usine Renault Somaca à Casablanca doit en effet entamer ce début mars la production des premières séries du programme "X52", autrement dit la Logan 2. Alors que Renault vient de signer avec les syndicats en France un accord compétitivité emploi destiné à relancer l'activité des sites français, le constructeur au losange investit donc en paralèlle dans le développement de sa gamme "Entry" (low-cost) au Maghreb.
Pour cela, Renault a engagé sur le site de Casablanca un programme d’investissements de 445 millions de dirhams (40 millions d’euros) sur deux ans avec 40 embauches à la clé. Détenu à 80% par Renault et 20% par PSA, la Somaca emploie 1 200 salariés et assemble des Logan, Sandero et autres Kangoo exportées pour moitié.
Cette usine historique du groupe français au Maroc a fabriqué 58 400 véhicules l’an dernier, un niveau record. À l'intérieur de ce vaste bâtiment blanc visible de l’autoroute vers Rabat, Renault opère sur le mode CKD (Complete Knock Down), à savoir l’assemblage de kits, même si certaines pièces viennent désormais d’équipementiers basés au Maroc tel SNOP (emboutissage) ou Denso (climatisation).
L’USINE EN 2012 N’AURA FABRIQUÉ QUE 50 000 VÉHICULES
Mais pour Renault, la production à grande échelle de la nouvelle Logan au Maroc se fera bien sûr dans quelques mois, sur son site géant de Melloussa coincé entre les collines verdoyantes de la région de Tanger, non sans retard. Après une inauguration en grande pompe par Carlos Ghosn, le patron de Renault Nissan et le roi du Maroc, le 9 février 2012, cette plateforme low-cost à deux pas du détroit de Gibraltar devait produire 70 000 véhicules l’an dernier. Mais une demande moins forte que prévue sur le Vieux continent a notamment ralenti sa montée en puissance.
L’usine en 2012 n’aura fabriqué que 50 000 véhicules pour plus des trois quart de Lodgy, un petit monospace et aussi des utilitaires Dokker. Ceux-ci sont badgés Dacia ou Renault selon les marchés. La "phase 2", l'extension du site, qui avait été confirmée début 2012 est en cours de réalisation. Mais la production sur ces nouvelles lignes qui devait être lancée au printemps 2013 ne démarrera qu’à la fin de l’été, selon des sources locales. Outre la Logan 2, cette extension doit aussi permettre de produire la nouvelle version de la Dacia Sandero, déjà fabriquée à Pitesti en Roumanie tout comme la Logan 2.
L'USINE EST TAILLÉE POUR PRODUIRE 170 000 VÉHICULES PAR AN
Installé le long de l’autoroute reliant Tanger au nouveau port Tanger Med d’où sont expédiés les véhicules, le site de Melloussa s’étend sur 280 hectares dont 25 couverts. Le terrain a été offert par l’État qui a déroulé le tapis rouge au constructeur, exempté d’impôt sur les sociétés pendant 5 ans (statut de zone franche). Par ailleurs, grâce à un montage financier associant dans une société ad-hoc la Caisse des dépôts et de gestion à 47,6% et Renault, les investissements matériels du site ne sont que partiellement supportés par le constructeur français qui en contrepartie verse un loyer à cette société.
Dans sa configuration initiale (phase 1), l'usine est taillée pour produire 170 000 véhicules par an sur la base de 5 000 heures travaillées, soit une capacité d’un peu plus de 30 véhicules/heure.
L’extension qui est en cours devrait ajouter une capacité équivalente de 30 véhicules par heure, soit un total de 340 000 véhicules par an, toujours sur la base de 5 000 heures travaillés. Mais ce rythme ne devrait pas être atteint avant plusieurs années. L’investissement total annoncé sur ce site est de 1,1 milliard d’euros dont environ 650 millions d’euros pour la première phase.
En matière d’effectif, le site doit employer à la fin des deux phases 6 000 salariés qui seront formés dans un institut dédié (IFMIA) géré par Renault adossé à l’usine. Elle en compterait déjà 3 500 personnes, toujours d'après des sources locales. Selon des données de Renault datant de l’an dernier, les coûts salariaux au Maroc (le SMIC actuel est d’environ 220 euros par mois) sont équivalents à ceux de l’Inde, deux fois inférieurs à ceux de la Roumanie et cinq fois aux coûts du Brésil.
LE SITE QUI A RADICALEMENT DYNAMISÉ LE TISSU INDUSTRIEL TANGÉROIS ET MAROCAIN
À noter que Renault a annoncé fin 2012, la création d’une usine d’assemblage en Algérie à Oran d’une taille plus modeste (25 000 puis 75 000 véhicules) et destiné au marché local quand celle de Tanger tournera à 90% pour l’export. À l’issue du projet, l’usine de Melloussa comptera à elle seule pour 10% des exportations marocaines, selon Renault.
Le site qui a radicalement dynamisé le tissu industriel tangérois et marocain a déjà généré une vingtaine d’investissements directs de sous-traitants et équipementiers (GMD, SNOP-FSD, Saint-Gobain, Denso…) dont une bonne part sur TFZ la zone franche de Tanger situé à 25 kms de l'usine.
De quoi renforcer aussi le réseau de fournisseurs au plan mondial de Renault. Ainsi si SNOP (découpage emboutissage) travaille à 90% pour Melloussa, ses productions sont intégrées dans le réseau logistique mondial du constructeur français (ILN). Et des pièces fabriquées à Tanger filent désormais vers la Colombie, la Russie ou l'Espagne.
LA GRANDE QUESTION : CELLE DE L’ARRIVÉE OU NON DE NISSAN
Une nouvelle zone franche (Tanger Automotive City) doit, de plus, ouvrir bientôt à proximité du site Renault. L’objectif d’intégration locale (hors motorisation) pour l’usine de Tanger est de 57% en 2015. De quoi renforcer au plan intérieur, la perception de Renault comme "constructeur national". De fait, celui-ci est déjà sur le modeste marché marocain (130 000 véhicules légers en 2012) leader incontesté avec 36,6% des ventes l’an dernier sous les marques Renault ou Dacia.
Quant à l’usine de Tanger, après l’extension en cours, la grande question à venir sera celle de l’arrivée ou non de Nissan notamment pour la production d’un utilitaire. Nissan était en effet associé au projet initial mais a jeté l’éponge en 2009 en pleine crise financière. Lors de l’inauguration du site, voilà un an, Carlos Ghosn avait évoqué le retour du japonais pour une "phase 3". Sur les plans de l’usine, un espace lui est toujours réservé.
À Tanger, Pierre-Olivier Rouaud
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