Il y a un an et demi, les professionnels de la pêche maritime retrouvaient espoir dans l'annonce du plan Halieutis. Un plan structurel et stratégique, supposé remettre de l'ordre dans un secteur au bord de l'anarchie, et propulser les professionnels vers le meilleurs de leur capacité! Mais une longue réunion organisée mardi soir à Casablanca a traduit leur déception. Halieutis, serait-ce finalement l'arbre qui cache la forêt?
Le Plan Halieutis rencontre des difficultés de mise en œuvre./DR
Morad Elghazzali, Secrétaire Général du syndicat des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime./AAlaouiMardi soir, le Collectif Pêche et Développement Durable, réunissant l'ensemble des professionnels de la pêche maritime, a organisé un débat à Casablanca, où chacun des experts du milieu a pu exprimer son sentiment vis-à-vis du Plan Halieutis.
Ce plan, rappelons-le, a été lancé en septembre 2009 pour répondre à une panoplie de contraintes et de défaillances rencontrées dans le secteur. Lors de la conception de la stratégie Halieutis, les rédacteurs reconnaissaient une défaillance considérable de la gestion des ressources halieutiques.
“Le Maroc ne dispose pas d'une véritable politique de gestion des ressources, ce qui a engendré une exploitation déséquilibrée des stocks”
Rachid Benkirane, le Président de la Fédération de Pêche Maritime (FPM).
Avec des ressources peu diversifiées, les opportunités de valorisation se voyaient limitées. En effet, le président de la Fédération ajoute que “85% des volumes débarqués sont constitués de pélagiques, et représentent seulement un quart de la valeur totale”.
Le Plan Halieutis était également sensé répondre à un équilibre géographique de pêche, sachant que “l'effort de pêche est surdimensionné au Nord et sous-dimensionné au Sud par rapport au potentiel de captures”, selon un professionnel.
Sans compter des problèmes de compétitivités, dus à un circuit de distribution désorganisé et une logistique peu compétitive.
Les cinq axes du plan Halieutis
Le plan Halieutis 2020 résume sa stratégie de développement en cinq points majeurs. • Développer l'aquaculture
• Développer des plans d'aménagement sur la base de quotas
• Mettre en place une infrastructure portuaire d'envergure
• Encourager le Global Operator
• Booster les pôles de compétitivité des produits de la mer
Bilan 2010 du Plan Halieutis
Lors de la présentation, il y a quelques jours au Parlement, des budgets sectoriels dans le cadre de l'adoption du projet de Loi de Finances 2011, Aziz Akhanouch, le ministre de l'Agriculture et de la Pêche maritime, faisait le bilan du Plan Halieutis.
Selon le ministre, des appels d'offres et appels à manifestation ont été lancés depuis le printemps de l'année écoulée pour les entreprises qui seront autorisées à exploiter le stock des petits pélagiques au sud de Boujdour.
“Une action qui s'inscrit dans le cadre de la mise en place d'un plan d'aménagement du petit pélagique” (surtout la sardine). Des conventions ont été signées suites à cet appel.”
Morad Elghazzali, ingénieur au ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime
Le ministère a aussi mis en place, en 2010, un plan d'aménagement de la pêche à la crevette, signé en décembre 2010, suite à des négociations qui ont duré cinq mois; et un plan pour les algues marines, dont l'objectif est de redresser la situation de cette filière.
Selon les chiffres de l'Institut National de Recherche Halieutique (INRH), la filière a accusé une baisse de 60% entre juin 1999 et juin 2008 dans la région d'El Jadida qui focalise 80% de la production nationale d'algues.
Autres mesures prises, le ministère a interdit depuis juin 2010 l'utilisation des filets maillants dérivants -dans un but de préservation de la biodiversité marine et de la protection d'espèces vulnérables capturées accidentellement par cet engin-, a renforcé les mesures de contrôle contre la pêche illicite, s'est équipé de 400 navires de balises de télécommunication et a modernisé les équipements de 15 navires de contrôle en mer.
Et enfin, pour favoriser le principe de Global Operator, le ministère de tutelle a désigné l’Office National des Pêches (ONP) pour garantir la restructuration des espaces portuaires.
“Un programme pour lequel le ministère a mobilisé 680 millions DH. Suite à cela, plusieurs conventions ont été signées avec l’Agence nationale des ports pour transférer progressivement la gestion des ports de pêches sous la responsabilité de l’ONP.”
Morad Elghazzali, ingénieur au ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime
Mais des interrogations persistent!
Ces avancées sont considérables pour un secteur où le désordre régnait en maître. Mais les professionnels n'y trouvent toujours pas leur compte, les mesures mises en place n'ayant pas encore démontré leur efficacité.
“Les mesures mises en place en matière de contrôle et de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, n'ont abouti a aucun résultat concret”
Abderrahmane Bousri, Président de l'Association de la Pêche Côtière
Les professionnels ont par ailleurs discuté du plan Ibhar, qui aurait connu un échec radical, et dont les responsables n'auraient pas encore présenté une alternative. Cet accord-cadre de 5 milliards DH devait depuis juin 2008 améliorer la rentabilité et l’efficacité économiques du secteur...
Aucune alternative non plus pour la politique des repos biologiques qui a démontré ses limites, notamment dans le segment de la pêche poulpière.
L'ONP a fait, pour sa part, l'objet d'un débat sérieux. La plupart des professionnels s'accordent à dire qu'il serait plus judicieux d'envisager une privatisation de l'Office dans la perspective de la refonte de la chaîne de commercialisation des produits de la mer.
Quant à l’offre de formation, à l’accompagnement des marins lors des arrêts de pêche, à l’assurance d’un revenu minimal et à l’attractivité du secteur de la pêche sur le plan social dans le Plan Halieutis, ces points sont pour les professionnels les aspects les plus déprimants de l'échec d'Halieutis.
Témoignage de Morad Elghazzali, Secrétaire Général du syndicat des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime
La stratégie Halieutis rencontre beaucoup de difficultés, parce que l'élément fondamental qui est la ressource humaine est quasi-absent. Il y a un manque de moyens humains, techniques et une très mauvaise stratégie de communication interne, ce qui met en déroute toutes les dispositions mises en œuvre par les différents plans d'aménagements.
Un autre grand problème vient du fait que la stratégie Halieutis a été élaborée par un bureau d'étude étranger, qui ne s'est pas donné la peine de tâter la réalité du terrain...
Conséquence: toutes les mesures prises sont plus théoriques que pratiques et c'est inconcevable parce que les enjeux sont de taille!
Le Plan Halieutis rencontre des difficultés de mise en œuvre./DR
Morad Elghazzali, Secrétaire Général du syndicat des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime./AAlaouiMardi soir, le Collectif Pêche et Développement Durable, réunissant l'ensemble des professionnels de la pêche maritime, a organisé un débat à Casablanca, où chacun des experts du milieu a pu exprimer son sentiment vis-à-vis du Plan Halieutis.
Ce plan, rappelons-le, a été lancé en septembre 2009 pour répondre à une panoplie de contraintes et de défaillances rencontrées dans le secteur. Lors de la conception de la stratégie Halieutis, les rédacteurs reconnaissaient une défaillance considérable de la gestion des ressources halieutiques.
“Le Maroc ne dispose pas d'une véritable politique de gestion des ressources, ce qui a engendré une exploitation déséquilibrée des stocks”
Rachid Benkirane, le Président de la Fédération de Pêche Maritime (FPM).
Avec des ressources peu diversifiées, les opportunités de valorisation se voyaient limitées. En effet, le président de la Fédération ajoute que “85% des volumes débarqués sont constitués de pélagiques, et représentent seulement un quart de la valeur totale”.
Le Plan Halieutis était également sensé répondre à un équilibre géographique de pêche, sachant que “l'effort de pêche est surdimensionné au Nord et sous-dimensionné au Sud par rapport au potentiel de captures”, selon un professionnel.
Sans compter des problèmes de compétitivités, dus à un circuit de distribution désorganisé et une logistique peu compétitive.
Les cinq axes du plan Halieutis
Le plan Halieutis 2020 résume sa stratégie de développement en cinq points majeurs. • Développer l'aquaculture
• Développer des plans d'aménagement sur la base de quotas
• Mettre en place une infrastructure portuaire d'envergure
• Encourager le Global Operator
• Booster les pôles de compétitivité des produits de la mer
Bilan 2010 du Plan Halieutis
Lors de la présentation, il y a quelques jours au Parlement, des budgets sectoriels dans le cadre de l'adoption du projet de Loi de Finances 2011, Aziz Akhanouch, le ministre de l'Agriculture et de la Pêche maritime, faisait le bilan du Plan Halieutis.
Selon le ministre, des appels d'offres et appels à manifestation ont été lancés depuis le printemps de l'année écoulée pour les entreprises qui seront autorisées à exploiter le stock des petits pélagiques au sud de Boujdour.
“Une action qui s'inscrit dans le cadre de la mise en place d'un plan d'aménagement du petit pélagique” (surtout la sardine). Des conventions ont été signées suites à cet appel.”
Morad Elghazzali, ingénieur au ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime
Le ministère a aussi mis en place, en 2010, un plan d'aménagement de la pêche à la crevette, signé en décembre 2010, suite à des négociations qui ont duré cinq mois; et un plan pour les algues marines, dont l'objectif est de redresser la situation de cette filière.
Selon les chiffres de l'Institut National de Recherche Halieutique (INRH), la filière a accusé une baisse de 60% entre juin 1999 et juin 2008 dans la région d'El Jadida qui focalise 80% de la production nationale d'algues.
Autres mesures prises, le ministère a interdit depuis juin 2010 l'utilisation des filets maillants dérivants -dans un but de préservation de la biodiversité marine et de la protection d'espèces vulnérables capturées accidentellement par cet engin-, a renforcé les mesures de contrôle contre la pêche illicite, s'est équipé de 400 navires de balises de télécommunication et a modernisé les équipements de 15 navires de contrôle en mer.
Et enfin, pour favoriser le principe de Global Operator, le ministère de tutelle a désigné l’Office National des Pêches (ONP) pour garantir la restructuration des espaces portuaires.
“Un programme pour lequel le ministère a mobilisé 680 millions DH. Suite à cela, plusieurs conventions ont été signées avec l’Agence nationale des ports pour transférer progressivement la gestion des ports de pêches sous la responsabilité de l’ONP.”
Morad Elghazzali, ingénieur au ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime
Mais des interrogations persistent!
Ces avancées sont considérables pour un secteur où le désordre régnait en maître. Mais les professionnels n'y trouvent toujours pas leur compte, les mesures mises en place n'ayant pas encore démontré leur efficacité.
“Les mesures mises en place en matière de contrôle et de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, n'ont abouti a aucun résultat concret”
Abderrahmane Bousri, Président de l'Association de la Pêche Côtière
Les professionnels ont par ailleurs discuté du plan Ibhar, qui aurait connu un échec radical, et dont les responsables n'auraient pas encore présenté une alternative. Cet accord-cadre de 5 milliards DH devait depuis juin 2008 améliorer la rentabilité et l’efficacité économiques du secteur...
Aucune alternative non plus pour la politique des repos biologiques qui a démontré ses limites, notamment dans le segment de la pêche poulpière.
L'ONP a fait, pour sa part, l'objet d'un débat sérieux. La plupart des professionnels s'accordent à dire qu'il serait plus judicieux d'envisager une privatisation de l'Office dans la perspective de la refonte de la chaîne de commercialisation des produits de la mer.
Quant à l’offre de formation, à l’accompagnement des marins lors des arrêts de pêche, à l’assurance d’un revenu minimal et à l’attractivité du secteur de la pêche sur le plan social dans le Plan Halieutis, ces points sont pour les professionnels les aspects les plus déprimants de l'échec d'Halieutis.
Témoignage de Morad Elghazzali, Secrétaire Général du syndicat des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et de la Pêche Maritime
La stratégie Halieutis rencontre beaucoup de difficultés, parce que l'élément fondamental qui est la ressource humaine est quasi-absent. Il y a un manque de moyens humains, techniques et une très mauvaise stratégie de communication interne, ce qui met en déroute toutes les dispositions mises en œuvre par les différents plans d'aménagements.
Un autre grand problème vient du fait que la stratégie Halieutis a été élaborée par un bureau d'étude étranger, qui ne s'est pas donné la peine de tâter la réalité du terrain...
Conséquence: toutes les mesures prises sont plus théoriques que pratiques et c'est inconcevable parce que les enjeux sont de taille!
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