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Exclusif : les détails du contrat programme logistique

Enfin, le contrat programme pour la logistique ! La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et le gouvernement s’apprêtent à signer cet engagement bilatéral tant attendu dans les semaines à venir. Ce contrat programme qui devait initialement s’étaler sur la période 2009-2015 est le résultat d’une réflexion entamée en 2008 déjà, renforcée par une étude menée par le cabinet McKinsey durant toute l’année 2009. Il constitue la base d’une nouvelle stratégie intégrée pour doper la compétitivité de la logistique au Maroc. Il est évident, en effet, que cette activité se trouve en décalage avec la politique des grands chantiers d’infrastructures réalisés durant ces dix dernières années ou en cours de réalisation (construction d’autoroutes, de ports, renforcement du réseau ferroviaire, etc.). Politique soutenue par la libéralisation et l’introduction de la concurrence dans le secteur du transport de marchandises.
Selon les experts, si le secteur de la logistique, qui contribue aujourd’hui à hauteur de 5% au PIB et emploie quelque 300 000 personnes, se situe à un stade intermédiaire aujourd’hui (voir notre supplément «Transport et logistique» en cahier détachable, dans ce même numéro), il présente un grand potentiel de développement, notamment au niveau de l’offre de service, de l’amélioration des coûts et des délais ainsi qu’au niveau du développement de certaines infrastructures spécialisées.
Le décor ainsi planté. Le contrat programme qui entrera en vigueur dès sa signature vise à établir le cadre global pour le développement de l’activité incluant toutes les branches (maritime, portuaire, ferroviaire, routière et plateformes). Il sera accompagné de contrats d’application sectoriels pour l’amélioration de la compétitivité. Une dizaine d’activités est ainsi concernée, dont les produits énergétiques, la distribution interne, l’import export et les matériaux de construction.

Un objectif environnemental aussi : 35% de CO2 en moins

De plus, des contrats spécifiques seront aussi élaborés pour le développement de zones logistiques dans les régions, principalement au niveau du Grand Casablanca et de Tanger-Tétouan. Ce qui suppose l’implication des opérateurs privés, des différents départements ministériels et des collectivités locales.
Ainsi, toutes les parties impliquées s’engageront sur des objectifs généraux clairs. Il s’agit de baisser les coûts de la logistique de 20% à 15% en 2015 et d’accélérer la croissance grâce à cette économie. On estime que l’émergence d’un secteur logistique performant avec des acteurs compétitifs et des plateformes de services professionnelles est en mesure de se traduire par une valeur ajoutée additionnelle qui peut atteindre 3 à 5% du PIB à l’horizon 2015, soit 15 à 20 milliards de DH à cet horizon, ce qui représenterait 0,5 à 0,7 de point de PIB annuellement.
Par ailleurs, tout un volet est consacré à l’apport logistique à l’économie en termes de réduction des nuisances et de décongestion des routes. Ainsi, la mise en œuvre du contrat devrait se traduire par une baisse de 35% des émissions de CO2 vers 2015 de même qu’une réduction de 30% du nombre de tonnes émises par kilomètre.

Un réseau national de zones logistiques multi-flux pour améliorer la connectivité

Cinq axes ont été définis pour atteindre ces objectifs. Ce sont la création d’un réseau national intégré de zones logistiques multi-flux (ZLMF), l’intensification des flux de marchandises (conteneurs, vrac et divers), l’incitation à l’émergence d’acteurs logistiques intégrés et à la mise à niveau des acteurs existants, la mise en œuvre d’un plan de développement pour la formation aux métiers de la logistique et la création d’un organisme de régulation et de bonne gouvernance.
La mise en place des plateformes logistiques, pierre angulaire de toute cette stratégie, nécessite des préalables et particulièrement la mobilisation d’un foncier à des prix raisonnables à proximité des villes, des ports et des lieux où est concentrée la demande. Il faudra également des infrastructures adaptées pour une connectivité efficace, et surtout une régulation du transport de marchandises en milieu urbain et dans les zones périphériques (voir encadré sur le cas de Casablanca).
L’objectif étant d’avoir un service logistique de haut niveau tout en tenant compte des politiques d’aménagement du territoire et des exigences du développement durable, le contrat programme estime la superficie globale du foncier pour la réalisation de ce schéma à 1 980 ha à l’horizon 2015 et à 3 200 en 2030. L’Etat s’engage ainsi à utiliser largement le foncier lui appartenant et aura recours, en cas de besoin, au foncier du privé grâce à des mesures incitatives.
Mais l’attention sera focalisée en premier lieu sur les zones de Casablanca et Tanger-Tétouan. La superficie globale pour la première est estimée à 567 ha à l’horizon 2015 et 926 en 2030 avec un contrat d’application spécifique pour cette région, alors que la seconde nécessite 207 ha en 2015 et 358 en 2030.
Plus tard, seront ciblées Rabat, Meknès, Fès, Marrakech, Agadir, Oujda, Kénitra, Khouribga, Settat, Nador, El Jadida, Safi, Béni Mellal, Taza et Dakhla. Les zones peuvent être étendues à d’autres villes en cas de besoin, ou regroupées si cela s’avère nécessaire pour la gestion des flux.

Transport & équipement, commerce et industrie, agriculture, intérieur… plusieurs départements ministériels concernés

Ceci étant, cinq types de plateformes sont prévues dans le cadre de ce schéma national intégré. Les premières sont les plateformes à conteneurs, sous douane ou pas, qui offrent des aires de stockage de dépotage/empotage, de triage de conteneurs par destination pour être acheminées vers les plateformes des autres villes qui seront aussi au nombre de cinq dans un premier temps (Casablanca, Tanger, Marrakech, Fès-Meknès et Oujda-Nador).
En deuxième lieu, on a les plateformes de distribution et de sous-traitance logistique qui seront développées pour être au service de la grande distribution et pour organiser les réseaux traditionnels de distribution. Une douzaine de villes a été retenue pour accueillir ce genre de plateformes, ce qui permet de toucher tout le territoire.
Troisièmement, une quinzaine de villes a aussi été sélectionnée pour abriter des plateformes destinées à rationaliser le flux des produits agricoles à partir des lieux de production vers les lieux de consommation. L’objectif, au-delà de la commercialisation de ces produits, consiste à avoir des infrastructures de manutention et de stockage avec des capacités importantes d’entrepôts frigorifiques pour assurer la continuité des chaînes de froid et la traçabilité des produits dans le respect des conditions d’hygiène. A ce titre, un programme de mise à niveau des marchés de gros est prévu dans toutes les villes.
Les quatrièmes sont les plateformes céréalières qui doivent constituer une réponse aux fluctuations de la production nationale et aux fluctuations du prix des céréales sur le marché international. Ainsi, de nouveaux silos seront construits avec des capacités de stockage des céréales à proximité des ports et des bassins de production et de consommation locales pour sécuriser l’approvisionnement et agir sur les prix. Ces lieux de stockage offriront aussi d’autres services comme le groupage de la production nationale, le lavage, la classification et la fertilisation des semences. Une forte coordination est prévue dans ce sens avec la mise en œuvre du plan Maroc vert. Une capacité de stockage de 15 millions de tonnes est ainsi prévue dans 13 villes.
Enfin, 15 villes sont concernées par les plateformes dédiées aux matériaux de construction pour arriver à un meilleur flux de ces matériaux, de leur commercialisation et de leur stockage. L’objectif visé est l’harmonisation des prix de ces matériaux et l’instauration d’une saine concurrence en termes de qualité et de prix.
Il faut signaler que les matériaux de construction constituent le flux de marchandises le plus important avec 25 millions de tonnes qui circulent chaque année à travers le pays, pour une grande part en camions.
La mise en œuvre du contrat programme logistique avec toutes ses composantes va nécessiter un investissement total de 116 milliards de DH à l’horizon 2030 dont 63 milliards pour la période initiale de 5 ans qui devait être comprise entre 2010 et 2015. Ces investissements seront mobilisés grâce à des partenariats entre opérateurs privés et publics. En effet, la contribution du Budget de l’Etat va se limiter aux infrastructures de liaison entre les plateformes, la formation et à la mise en place de l’Agence de régulation et de l’Observatoire de la logistique.
Pour finir, il convient de signaler que si ce contrat programme est l’œuvre du département du transport et de l’équipement, sa mise en œuvre nécessitera la mobilisation de plusieurs acteurs publics dont les départements du commerce et de l’industrie, de l’agriculture, de l’intérieur ainsi que des entreprises et établissements publics. En ce sens, l’existence d’un organe de régulation est plus que nécessaire.

Découpage :Six zones logistiques multi-flux pour Casablanca


La nouvelle stratégie de développement logistique prévoit pour l’agglomération du Grand Casablanca la mise en place de six zones logistiques multi-flux qui seront logées dans les localités de Zénata, Nouaceur, Ouled Salah, Médiouna et Bouskoura.
Zénata accueillera la plus grande plateforme à conteneurs du pays qui sera développée progressivement en fonction de l’évolution de la demande. Pour accompagner le développement de cette zone, le gouvernement devra élaborer un nouveau schéma portuaire en relation avec cette zone par la construction d’une connexion routière et ferroviaire de 20 km permettant une liaison rapide et facile entre le port de Casablanca et la zone de Zénata.
Cela contribuerait à la décongestion de Casablanca, notamment par la régulation de la circulation des camions de marchandises. En effet, l’Etat s’engage dans cette optique à encourager la conclusion de partenariats entre les établissements publics et les entreprises pour développer un service de traitement des conteneurs dans cette zone et à interdire la circulation des poids lourds de grand tonnage et des camions porte-conteneurs à l’intérieur du périmètre urbain.
La ville, elle-même, sera approvisionnée par des camions à petits tonnages à partir de la zone logistique avec une régulation qui permettrait de limiter la congestion de la circulation. Le secteur privé s’engage, pour sa part, à promouvoir cette zone logistique et à sensibiliser les opérateurs économiques aux bienfaits du développement durable et à la congestion de la ville. Il s’agit notamment de sensibiliser les transporteurs poids lourds pour reconvertir une partie de leur activité en transport de petit tonnage.


Synopsis :Les chiffres du contrat programme


116 milliards de DH à investir en 20 ans dont 63 milliards d’ici à 2015.

Baisse des coûts de logistique de 15 à 20 % d’ici à 5 ans.

3 200 ha de foncier à mobiliser en 20 ans dont 1 980 en 5 ans.

Cinq types de zones logistiques : conteneurs, produits finis, blé, produits agricoles, matériaux de construction.

Une trentaine de villes connaîtront des aménagements d’adaptation en matière d’infrastructures.



Ressources humaines :62 000 personnes à former d'ici à 2015


Pour faire face aux besoins en ressources humaines de ce contrat programme logistique, les pouvoirs publics s’engagent à former à l’horizon 2015 autour de 60 000 personnes tous profils confondus. Cette formation s’appuiera sur le système de l’enseignement supérieur, en l’occurrence les universités et les grandes écoles d’ingénieurs ainsi que les écoles de techniciens. Elle s’articulera autour du développement des masters spécialisés au sein des facultés et des écoles, mais il est aussi prévu de recourir au plan 10 000 ingénieurs avec l’adaptation de certaines filières aux besoins en logistique. Par ailleurs, on compte sur l’activation des filières généralistes Bac+3 et Bac+2.
Pour les autres profils, il s’agira de mettre à contribution l’Office de formation professionnelle et de la promotion du travail (OFPPT) qui dispense déjà des formations aux métiers de la logistique dans certains de ses établissements, comme c’est le cas à Casablanca, en partenariat avec le ministère du transport et les professionnels. L’Etat mettra ainsi à la disposition de l’office des terrains à l’intérieur des zones logistiques pour lui permettre un accompagnement de proximité au sein de ces plateformes. A ce titre, 6 à 8 centres de formation de techniciens et opérateurs seront créés à Casablanca, Rabat, Tanger, Oujda, Fès et Marrakech.
Il est aussi prévu d’encourager les opérateurs privés à créer des instituts spécialisés de formation dans les domaines logistiques, notamment ceux non couverts par l’OFPPT comme le transport ferroviaire ou maritime. Ces instituts peuvent avoir le soutien de l’Etat y compris financier. L’Agence nationale pour la promotion de l’emploi et des compétences (ANAPEC) peut aussi être mise à contribution pour des partenariats avec les opérateurs privés de formation spécialisée dans ces métiers. Toujours est-il qu’il est prévu de former à l’échéance 2015 quelque 800 managers, 1 500 ingénieurs, 12 950 techniciens et 46 300 opérateurs spécialisés, soit un total de 61 600 personnes.

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